Le Syndicat National des Propriétaires et Copropriétaires (SNPC) a pris connaissance avec intérêt des intentions du Gouvernement wallon en matière de réforme du logement privé. Les propositions formulées hier ayant un caractère officiel, le SNPC tient à y réagir de la même manière, même si certains contours de cette politique étaient dessinés depuis quelques mois, via les déclarations dans la presse.

Le présent communiqué comprend quatre points :

- Le contexte et la forme
- La création d’un climat de confiance
- Les premiers commentaires quant aux propositions formulées
- Les points manquants

1- Le contexte et la forme

Le mot d’ordre du SNPC est « vigilance ».

Il y a quelques mois, le SNPC a rencontré le Ministre Furlan pour un échange de vue global et d’ailleurs constructif. Il avait notamment insisté sur la nécessité d’assurer la stabilité en regard de la loi du 20 février 1991 sur les baux affectés à la résidence principale du preneur (modifiée en 1997 et 2007) et ce d’autant plus qu’elle avait fait ses preuves et que tant les propriétaires que les locataires y sont aujourd’hui habitués.

Cependant, en regard des mesures annoncées, il n’y a eu aucune concertation à proprement parler.

Ce sera donc avec grand plaisir que le SNPC répondra aux demandes de consultations qui lui seront adressées. Surtout que, depuis un an, le SNPC a eu des contacts, à leur demande, avec les groupes PS, MR, cdH et ECOLO au Parlement wallon, ainsi qu’avec la FGTB sur le dossier plus spécifique de la création du fonds de garanties locatives.

2- La création d’un climat de confiance

Pour faire face à l'ensemble des besoins en logement de nos concitoyens, le logement « public » ne suffira pas : il faudra s'appuyer sur le secteur privé et créer un climat de confiance en vue d’inciter les particuliers à investir dans le marché locatif.

C'est d'ailleurs grâce au secteur privé que, depuis des décennies, l'offre de logement est conséquente et, contrairement à ce que soutiennent certains, à des conditions raisonnables notamment par rapport aux loyers pratiqués dans les pays voisins.

Le SNPC espère dès lors que la majorité wallonne n’ira pas à contre courant, en abusant des nouvelles compétences de la Région en matière de baux et de fiscalité immobilière pour réduire encore les droits des propriétaires-bailleurs.

Le SNPC est ouvert à la discussion sur tous les aspects, dans le but de rechercher des solutions permettant à tout un chacun d'accéder à un logement à des conditions raisonnables. Néanmoins, cela ne doit pas se faire sur le dos des propriétaires-bailleurs et à leurs frais. C'est aux pouvoirs publics à en assumer la prise en charge avec les impôts que nous payons tous.

Il faut en outre que les préoccupations des bailleurs soient mieux prises en compte, notamment en ce qui concerne le paiement des loyers ou encore la couverture des dégâts locatifs. Il faut aussi faire respecter le droit au logement : qui dit droit dit aussi les obligations corrélatives dont le paiement du loyer. Ce dernier doit redevenir une dépense prioritaire.

En fonction de l’évolution des choses, et dans un contexte liant réforme de la législation sur les baux et évolution de la fiscalité immobilière (au Fédéral et au niveau des Régions), le SNCP, comme il l’a déjà précisé à plusieurs reprises, n’exclut pas d’inciter les propriétaires à une « grève » de l’investissement si nécessaire. Mais nous n’en sommes pas là et il serait intéressant que le Ministre Furlan se positionne sur la nécessité de rééquilibrage des relations entre propriétaires et locataires, ses premières déclarations donnant l’impression que le tour de visse serait plutôt vis-à-vis des bailleurs.

3- Premiers commentaires sur les propositions formulées

- De manière générale, le SNPC constate – et s’en réjouit - que le Ministre Furlan ne remet pas fondamentalement en cause la loi du 20 février 1991 sur les baux à loyer affectés à la résidence principale du preneur (notamment sur les notions de durée et les modalités des congés des parties).

Les textes définitifs devront cependant être relus attentivement, dès lors que le journal L’ECHO fait état d’une ‘réflexion sur les délais de préavis des baux de courte durée’.

- Le SNPC n’est de prime abord pas opposé à des grilles indicatives de loyers, dès lors qu’il est normal que les consommateurs – ici locataires – soient informés des prix du marché (et inversement pour les nombreux bailleurs qui louent trop bon marché).

Par contre, il s’opposera à tout caractère obligatoire, et cela constituera un casus belli ! On ne peut que regretter que le Ministre Furlan considère déjà qu’il s’agira de la prochaine étape !

Il est par contre légitime pour la Région wallonne de lier l’octroi de primes à la rénovation ou à l’isolation au respect de telles grilles indicatives.

- En matière de lutte contre les logements inoccupés, le SNPC n’a jamais été opposé à des mesures en la matière. Cependant, de nombreuses mesures existent déjà. Les textes sont donc attendus pour en apprécier le contenu. Il est clair que les immeubles inoccupés en général (privés ET publics) peuvent constituer des nuisances pour les voisins et ils pourraient venir renforcer le cas échéant l’offre de logements. Il faut noter d’emblée que, sur base d’une étude réalisé récemment à Charleroi, la potentialité de remise sur le marché locatif est moins importante que dénoncé régulièrement (10.000 logements potentiellement inoccupés ramenés à moins de 3.000…).

Par contre, le SNPC ne peut que s’étonner – à nouveau – que seuls les propriétaires privés soient visés par les dispositions envisagées et qu’aucune mesure n’est prévue vis-à-vis des propriétaires publics qui peuvent en toute impunité laisser des immeubles inoccupés, souvent pendant des périodes très longues. Sont visés ici notamment les immeubles de logements mais aussi d’autres biens qui pourraient le cas échéant être transformés en logements.

Le SNPC demandera au Ministre Furlan des mesures en la matière, aux pouvoirs publics de montrer l’exemple.

- Le SNPC n’a évidemment pas opposé à la lutte contre les discriminations et il informe régulièrement ses membres à ce sujet quant à leurs droits et leurs obligations.

Par contre le SNPC s’opposera à toute mesure (et nouveau il s’agira d’un casus belli) visant à interdire à un propriétaire bailleur de pouvoir tenir compte (et d’apprécier) de la solvabilité des candidats locataires en regard du loyer demandé et des charges du logement concerné. Il est communément admis que les charges de logement (loyer et charges) ne doivent pas dépasser entre 30 à 35 % des revenus.

- En matière de commissions paritaires locatives, le SNPC doute de l’intérêt de nouvelles structures de ce type (voir leur coût) et les expériences pilotes menées en son temps à Bruxelles, Charleroi et Gand ne furent pas des succès, contrairement à que certains avancent. Il est donc extrêmement réservé.

Le SNPC considère que la conciliation se fait déjà devant les Juges de Paix et il s’opposera (nouveau casus belli) à ce qu’il s’agisse d’un préalable à l’introduction de toute procédure en justice comme ce fut le cas de 1997 à 2008 avec la conciliation obligatoire, supprimée en 2008 tant elle avait montré son inefficacité.

- Le SNPC regrette que le Gouvernement wallon, dans le cadre de la mise en place d’un Fonds de garantie locative, n’envisage pas, tenant compte des différents mécanismes envisagés, de fixer la garantie à trois mois de loyers (et pourtant d’aucuns non suspects de sympathie pour les bailleurs comme le Professeur Nicolas Bernard le suggèrent !).

Dans un tel contexte, le SNPC d’une part s’opposera au caractère obligatoire du fonds de garantie (cautions constituées en argent – et il faudra que la Région wallonne couvre l’ensemble des engagements pris par le Fonds), et d’autre part entend bien soutenir la co-existence des autres types de garanties. Il serait également intéressant d’interroger les autorités européennes sur la légalité du caractère obligatoire d’un fonds de garantie en regard de la libre circulation des services notamment.

- Concernant le bail étudiant, le SNPC examinera avec attention les propositions qui seront formulées. Il attire cependant l’attention sur le fait que créer de plus en plus de régimes particuliers pourrait avoir pour conséquence de professionnaliser le fonction de bailleur, notamment de kots d’étudiants et de faire fuir le bailleur lambda (voir notamment la possibilité de mettre fin en cour d’année au bail) avec pour conséquences une diminution de l’offre et une augmentation des loyers, objectif contraire à celui qui est poursuivi.

- Quant à différentes mesures, le SNPC n’est pas opposé à la discussion  sur les sujets suivants, en fonction des textes proposés :

• La révision de la liste des réparations locatives ;
• Une assurance obligatoire responsabilité du locataire en cas d’incendie ou de dégâts des eaux (mais pas à charge du bailleur) et de rappeler que le SNPC demande depuis des années que cela soit aussi obligatoire pour les propriétaires (occupants ou bailleurs) ;
• Une meilleure appréhension de la situation en cas de décès du locataire et notamment de faciliter sans frais la récupération par le bailleur de son bien ;
• Le régime de la colocation et un pacte de colocation, mais il faut surtout que les pouvoirs publics acceptent le phénomène ce qui n’est pas le cas des communes au travers de différentes taxes voulant assimiler la colocation à la location de logements de moins de 28 m2 ;
• Le renforcement de l’obligation d’enregistrement ;
• un bail type, un état des lieux type, etc.. Le SNPC dispose d’ailleurs à ce sujet de documents qu’il ne demande qu’à voir dupliquer…

4- Les points manquants

Dans l’immédiat, le SNPC constate que deux points importants sont manquants :

- Nonobstant des déclarations très viriles du Ministre Furlan à Sud Presse il y a quelques mois, le SNPC ne trouve pas dans les articles et autres communiqués dont il a pu prendre connaissance de propositions de mesures visant à raccourcir les délais pour permettre à un bailleur de récupérer son bien en cas de non paiement par un locataire de ses loyers et charges.

Cette mesure figure pourtant noir sur blanc dans la déclaration de politique régionale adoptée en 2014 lors de la mise en place de l’actuelle majorité wallonne. S’agissait-il d’un leurre pour « endormir » les propriétaires bailleurs ?

- Le logement, ce n'est pas uniquement les relations bailleurs-locataires (ou encore la fiscalité immobilière), c'est aussi la copropriété. Le SNPC avait abordé cette question lors de sa rencontre avec le Ministre Furlan et regrette dès lors qu’aucune mesure ne soit envisagée pour mieux prendre en compte cette réalité qui concerne à la fois le patrimoine, le logement et le pouvoir d'achat de nombreux citoyens. Ce n’est pas « que » quelques articles dans le Code civil restés il est vrai de compétence fédérale.

A défaut d’y prêter une attention particulière, il faut s'attendre à de graves difficultés dans les années à venir, comme c'est malheureusement le cas en France où les autorités ont dû investir des montants considérables (et ce n’est pas fini) pour venir en aide à des centaines de copropriétés aux abois. Or, mieux vaut prévenir que guérir. La Belgique compte près de 176.000 copropriétés dont près de 30.000 en Région wallonne.