Diviser une maison unifamiliale en petites logements et kots d'étudiants. Oui, mais pas à n'importe quelles conditions !
Par Jean-Pierre Balthasar, Avocat au barreau de Liège
A l’heure actuelle, transformer une maison unifamiliale en plusieurs kots ou petits logements constitue une pratique courante. Attention : cette pratique ne peut se réaliser sans un permis d’urbanisme et sans un permis de location, suivant la réglementation en Région wallonne !
DÉLIVRANCE D’UN PERMIS D’URBANISME
L’article D.IV.4, 5°, 6° et 7° du Code du développement territorial définit les actes et travaux soumis à la délivrance d’un permis d’urbanisme, dont notamment :
« (…) 5° transformer une construction existante; par « transformer », on entend les travaux d’aménagement intérieur ou extérieur d’un bâtiment ou d’un ouvrage, en ce compris les travaux de conservation et d’entretien, qui portent atteinte à ses structures portantes ou qui impliquent une modification de son volume construit ou de son aspect architectural ;
6° créer un nouveau logement dans une construction existante ;
7° modifier la destination de tout ou partie d’un bien, en ce compris par la création dans une construction existante d’un hébergement touristique ou d’une chambre occupée à titre de kot, pour autant que cette modification figure sur une liste arrêtée par le Gouvernement en tenant compte des critères suivants :
a) l’impact sur l’espace environnant ;
b) la fonction principale du bâtiment; (…)
Par créer un nouveau logement dans une construction existante au sens du 6°, il faut entendre créer, avec ou sans actes et travaux, un nouvel ensemble composé d’une ou de plusieurs pièces, répondant au minimum aux fonctions de base de l’habitat à savoir cuisine, salle de bain ou salle d’eau, wc, chambre, occupé à titre de résidence habituelle ou de kot et réservé en tout ou en partie à l’usage privatif et exclu sif d’une ou de plusieurs personnes qui vivent ensemble, qu’elles soient unies ou non par un lien familial. (…) »
Il est important de préciser que la création d’une seule chambre occupée à titre de kot ne donne pas lieu à la demande d’un permis.
A titre d’exemples, ne sont pas soumis à un permis d’urbanisme :
- l’aménagement d’une chambre existante ou la création d’une nouvelle chambre dans le cadre de l’accueil d’un parent ;
- l’utilisation en colocation d’un logement unifamilial existant ou d’un appartement pour autant qu’il ne s’agisse pas d’un kot ;
- l’aménagement d’un conteneur en logement car ce n’est pas une construction ;
- …
QUELLES SONT LES CONSÉQUENCES D’UN DÉFAUT DE PERMIS D’URBANISME ?
Le propriétaire d’une maison unifamiliale ayant transformé celle-ci en plusieurs kots ou petits logements sans disposer de permis d’urbanisme peut se voir imposer une sanction pénale, une mesure de réparation ou encore une proposition de transaction (Livre VII du Code du développement territorial).
Les poursuites pénales relèvent de l’appréciation du Parquet.
PAS DE PERMIS DE LOCATION SANS PERMIS D’URBANISME !
Le propriétaire d’une maison unifamiliale qu’il souhaite transformer en petits logements destinés à la location est contraint d’obtenir après le permis d’urbanisme, un permis de location.
En effet, l’article 10 du Code wallon du logement et de l’habitat durable dispose que pour pouvoir bénéficier d’un permis de location, « le logement doit (…) avoir été construit, aménagé ou créé dans le respect des dispositions applicables en matière d’aménagement du territoire et d’urbanisme ».
Conformément à l’article 11 du Code wallon du logement et de l’habitat durable, la demande de permis de location doit être introduite auprès du Collège communal, accompagnée d’une attestation de conformité délivrée par un enquêteur agréé par le ministre wallon du logement.
Il appartient, dès lors, au futur bailleur de mandater une personne agréée qui vérifiera le logement et lui délivrera ladite attestation.
Le permis, une fois délivré, est valable pour une durée de cinq ans.
QUELLES SONT LES CONSÉQUENCES DU DÉFAUT DE PERMIS DE LOCATION ?
L’absence de permis de location entraîne des sanctions d’ordre pénal, administratif et civil.
Sur le plan pénal, le bailleur ayant mis son bien en location sans permis encourt, en fonction de la gravité du manquement et de la récidive éventuelle, une amende allant de 500,00 à 50.000,00 euros et un emprisonnement de huit jours à un an.
Sur le plan administratif, selon l’article 200bis du Code wallon du logement et de l’habitat durable, si le Ministère Public ne poursuit pas le bailleur dans un délai de deux mois suivant la réception d’un constat d’infraction, des sanctions administratives peuvent être infligées.
Le montant de l’amende varie de 500,00 à 12.500,00 euros par logement en fonction de la gravité du manquement.
Sur le plan civil, la doctrine et la jurisprudence, dans leur majorité, considèrent qu’un défaut de permis de location impacte directement la relation entre le bailleur et le locataire en entraînant la nullité absolue du bail.
EN GUISE DE CONCLUSION
Les conséquences d’un défaut de permis d’urbanisme et de location sont importantes.
En tant que propriétaire, avant de s’engager dans la transformation de maisons unifamiliales en plusieurs kots ou petits logements, il convient d’être extrêmement prudent et de veiller à obtenir, dans un premier temps, un permis d’urbanisme et dans un deuxième temps, un permis de location. Vous serez ainsi à l’abri de toutes poursuites administrative et pénale, et de toute action civile à votre encontre.