Justice & droits d’accès : le gouvernement revoit (mal) sa copie
En février 2017, la Cour constitutionnelle avait annulé une loi du 28 avril 2015 qui prévoyait un droit de rôle majoré, calculé en fonction de la valeur de la demande, dû par chaque demandeur et pour chaque instance (Le Cri de mars 2017, p. 37).
Le droit de mise au rôle est une rétribution réclamée à toute personne qui demande l’ouverture d’un dossier en justice. En fonction de l’issue du dossier, ce montant peut être mis à charge de la personne qui est ‘convoquée’ devant les cours et tribunaux.
Une nouveau projet de texte a été adopté en première lecture par la commission finances de la Chambre ce 4 juillet 2017. Ce nouveau teste prévoit l’augmentation des droits de greffe comme suit :
- de 40 à 50 € devant la justice de paix ;
- de 100 à 165 € en première instance ;
- de 210 à 400 € en appel, et
- de 375 à 650 € devant la Cour de cassation.
Le nouveau projet abandonne le critère d'appréciation de la valeur pécuniaire de la demande pour déterminer le droit de mise au rôle, jugé non pertinent par la Cour constitutionnelle. L'objectif était de lier l'ampleur des droits de greffe à la complexité des affaires.
Le nouveau projet du gouvernement prévoit un tarif simplifié, sans élément de variabilité. Toutefois, il maintient l’objectif budgétaire, qui est fixé à 20 millions d’euros, ce qui a pour conséquence une augmentation parfois très importante des tarifs.
Ainsi le montant des droits de greffe serait adapté de la manière suivante:
- Justices de paix : 50 € au lieu de 40 ;
- Tribunaux de 1ère instance et tribunaux de commerce : 165 € au lieu de 100 ;
- Cour d’appel : 400 € au lieu 210 ;
- Cour de cassation : 650 € au lieu 375.
Selon AVOCATS.be, cette augmentation est particulièrement difficile à accepter puisqu’elle représente, comme dans certains cas, près de 100 % du montant actuel.
Le législateur ne doit pas perdre de vue l’appel à la prudence lancé par la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 23 février 2017 au sujet de la T.V.A. sur les honoraires d’avocats. Dans cet arrêt, la Cour constitutionnelle avait reconnu que la T.V.A. alourdissait la charge financière liée à l’exercice du droit à un recours effectif et avait invité le législateur à en tenir compte lorsqu’il prendrait d’autres mesures susceptibles d’alourdir le coût des procédures juridictionnelles.
Dans le même ordre d’idée, le Conseil supérieur de la justice a estimé, dans un avis du 19 juin 2017, qu’il n’ y avait pas lieu d’introduire cette réglementation: « Il est acceptable d’attendre une participation raisonnable de la part du justiciable. Toutefois, la participation demandée actuellement est déjà « raisonnable » (...) Les finalités consistant à réaliser des objectifs budgétaires et à dissuader des justiciables d’aller en appel sont difficilement conciliables entre elles. Elles portent atteinte au principe de l’accès au juge sans donner de justification valable à cet égard.»
Le Conseil d’Etat s’est lui aussi montré très réservé dans son avis joint au projet de loi.
« Cela suffit! » estime Jean-Pierre Buyle, président d’AVOCATS.« Ces dernières années, les obstacles financiers se sont multipliés. L’accès à la justice des classes moyennes est réellement en péril! »
Affaire à suivre.
Source : communiqué de presse du 4 juillet 2017 d’AVOCATS.be