Le cas du propriétaire-bailleur, dont le locataire décède sans héritiers connus, a déjà été évoqué dans nos colonnes.

Que faire si c’est un copropriétaire qui décède ?

Une toute récente décision du président du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles est à mettre en évidence.

La situation de la copropriété

Un copropriétaire dans un grand immeuble vient à décéder.

Ce décès survient dans un hôpital.

Le syndic de la copropriété l’apprend par une voisine du défunt, prend contact avec l’hôpital qui signale que personne ne s’est préoccupé ni du décès ni de l’organisation des funérailles.

Il n’y a pas d’arriérés de charges, mais l’appartement est abandonné. Les futures charges ne seront pas payées et l’appartement lui-même ne sera pas surveillé, par exemple en cas de sinistre. Il va falloir régler notamment les radiateurs pour l’hiver et veiller à ce qu’aucun sinistre ne se produise.

Que va faire le syndic ?

En pareil cas, le temps n’arrange pas les choses, même si en théorie un héritier pourrait se présenter à tout moment, accepter la succession qui contient notamment un appartement d’une bonne valeur, ce qui n’indique cependant pas que l’actif va dépasser le passif qui peut être tout à fait inconnu.

Quelle procédure intenter ?

Il existe en pareil cas, une procédure rapide, mais il faut préalablement prendre divers renseignements qui ne sont pas tous facilement accessibles et certainement pas à des particuliers.

En l’espèce, la copropriété choisit un avocat qui se procure les renseignements au sujet du défunt auprès du registre national des personnes physiques.

Un particulier n’a pas accès à ce registre, mais un huissier ou un notaire bien. Les avocats y ont aussi accès, mais à l’intervention soit de l’Ordre des Barreaux francophones et germanophones (OBFG), soit de l’Orde van Vlaamse Balies (OVB).

Se procurer un tel document coûte 7,50 € à l’avocat, qui doit aussi écrire au Registre central des testaments, tenu par les notaires, pour savoir si le défunt avait déposé un testament ou son notaire qui peut aussi donner des indications pour retrouver des héritiers.

Un acte de décès doit préalablement être obtenu auprès de la commune où le défunt est décédé.

Voilà pour les questions administratives.

Autres recherches

Avant de préparer une requête, il est indispensable d’essayer de trouver des héritiers et prouver que cette recherche a été faite, mais sans succès.

Evidemment, si des héritiers sont trouvés, il faut prendre contact avec eux en demandant la position qu’ils vont adopter face à cette succession.

La procédure

Une requête doit être déposée ensuite devant le Président du Tribunal de première instance de l’arrondissement où est intervenu le décès.

Petite remarque pour Bruxelles : il existe deux tribunaux de première instance, soit le Tribunal de première instance francophone et le néerlandophone.

Suivant le cas, la requête devra être déposée devant l’un ou l’autre tribunal, sur base de l’article 584-3 du Code judiciaire, qui, pour l’instant en tout cas, est applicable pour toute la Belgique.

La requête doit être accompagnée des documents précités et être assez soigneusement motivée, en expliquant la situation et les recherches faites.

Que va faire le président ?

Si tout est en ordre, il va en quelques jours désigner un administrateur provisoire de la succession du défunt, avec la mission qu’il précisera, c’est-à-dire et en résumé :

> Faire l’inventaire de la succession ;

> Passer tous les actes et prendre les décisions que les circonstances imposent ;

> Rechercher les héritiers et, s’il n’en trouve pas, déposer une requête en désignation d’un curateur à succession vacante.

Les administrateurs, comme les curateurs, sont généralement des avocats juges suppléants, qui sont d’ailleurs très souvent spécialisés dans cette activité. Les administrateurs travaillent avec un expert de leur choix et lui confient les tâches matérielles nécessitées par la mission.

La mission donnée par le juge à l’administrateur est moins large qu’auparavant, comme l’a souligné le magistrat remplaçant le président du Tribunal de première instance de Bruxelles, chargé de ce type de dossier, qui qualifie sa politique de plus

stricte en ce sens qu’il limite les pouvoirs de l’administrateur provisoire à l’essentiel, de façon à ne pas multiplier les frais et ne faire, par exemple, des recherches successorales dans le cas où le défunt ne laisserait effectivement pas de succession.

L’intérêt d’une telle procédure

L’intérêt est multiple, soit :

> Éviter que la situation ne stagne, avec les inconvénients qu’on imagine ;

> En l’absence d’héritiers (c’est le curateur qui le fera), vendre l’appartement pour payer les dettes de la succession, le solde positif – s’il existe – revenant à l’Etat ;

> Eviter que la créance de la copropriété pour les charges ou appels de fonds pour travaux, etc. augmente.

N’oublions pas que la copropriété ne dispose que d’un privilège limité pour le paiement de ses charges.

Par privilège, il faut comprendre qu’en cas d’existence de plusieurs créanciers, et d’insuffisance d’actifs, elle pourra être payée avant d’autres créanciers ne bénéficiant pas de privilège.

Cette question a d’ailleurs déjà été évoquée dans nos colonnes et le SNPC peut se vanter d’avoir obtenu ce privilège, même s’il estime qu’il est insuffisant pour protéger à 100 % les associations de copropriétaires.

Par Alfred DEVREUX, Avocat au Barreau de Bruxelles, Ancien Président du SNPC-NEMS

 

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